L’innovation participative : époques différentes, mêmes questionnements ?

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Publié le 2 mai 2021 dans L'invité

Depuis janvier 2021, Conseil & Recherche mène une recherche collaborative sur l’innovation participative, avec six entreprises partenaires (la CNAF, la CNAM, Engie, GRTgaz, Orange et Pôle Emploi), un partenaire académique (ESSCA) et un conseil d’orientation d’experts, où siège Muriel Garcia, Présidente d’Honneur de l’Association Innov’acteurs. Nous y abordons l’innovation participative sous un double prisme : que nous dit la littérature scientifique en sciences humaines et sociales sur la question ? et que font les organisations, en France et à l’étranger, sur le sujet ?

Dans le cadre de notre investigation, nous avons récemment pris connaissance d’un compte-rendu, établi par l’association des Amis de l’école de Paris, à la suite d’une table-ronde organisée sur l’innovation participative en avril 1999. Celle-ci réussissait trois témoins et précurseurs de l’innovation participative de la fin des années 1990 : Michel Brisson, alors chargé de Mission Innovation chez EDF-GDF Services, Hubert Richard, lorsqu’il qu’il occupait des fonctions à la Direction Générale de la RATP et l’ancien Chef de la Mission pour le Développement de l’Innovation Participative (notons que nous parlions alors seulement de développement !) du Ministère de la Défense, Alain Bonavita.

Si les échanges des trois hommes sont teintés par l’époque à laquelle appartient leur débat (la question du regard que posent les femmes des innovateurs sur l’investissement professionnel de leur mari peut par exemple faire sourire), il est surprenant de constater la permanence des difficultés qu’ils évoquent dans la mise en place de l’innovation participative. Ancrage stratégique des innovations, implication du top management et du management intermédiaire, allocation de temps dédié à l’innovation dans le travail quotidien, mécanismes de reconnaissance… sont autant de problématiques que nous observons, en 2021, au sein de la trentaine d’organisations que nous avons rencontrées.

Est-ce à dire que le sujet de l’innovation participative n’aurait pas progressé depuis vingt ans ? La réponse est évidemment négative. Les vingt dernières années ont vu émerger de nouveaux outils, notamment numériques, qui ont facilité la participation aux démarches d’innovation, mais également de nouvelles formes de participation, plus entrepreneuriales, comme les programmes d’intrapreneuriat. Les organisations se sont également progressivement ouvertes à l’apport de connaissances externes dans leur processus innovation, à travers des démarches d’open-innovation, les conduisant à envisager leurs activités d’exploration dans une perspective écosystémique. Plus récemment, beaucoup ont compris l’enjeu de mieux articuler leurs programmes et leurs efforts d’innovation, parfois foisonnants, mais encore trop cloisonnés. La crise actuelle a, enfin, mis en lumière la nécessité de transformer les organisations du travail, et les modes de management qui leur sont associés. Ces évolutions génèrent inévitablement de nouveaux enjeux et de nouveaux questionnements autour de l’innovation participative.

Ce que l’apparente persistance des difficultés qui lui sont associées nous révèle peut-être en revanche, c’est que la transformation culturelle nécessaire à la mise en place et à la pérennité de ces démarches demeure, encore aujourd’hui, un processus long, itératif, jamais complètement achevé, fait de petits pas, de retours en arrière, mais aussi et surtout, d’apprentissages pour les organisations du travail d’hier et de demain.

Laëtitia Gabay-Mariani
Docteure en sciences de gestion
Chercheure @ Conseil & Recherche